L'OFT publie un avis d'experts sur le recours à l'e-cigarette dans l'arrêt du tabac
Publié le 30 Avril 2014
An English translation of this Expert opinion (Adaptations of smoking cessation practice in the context of electronic cigarettes ?) is available here.
PARIS, 30 avril 2014 (APM) - Dix experts, réunis à l'initiative de l'Office français de prévention du tabagisme (OFT), ont formulé 45 constats et recommandations pour guider les professionnels de santé sur la conduite à tenir concernant le recours à la cigarette électronique notamment dans l'arrêt du tabac.
"Il existe depuis plusieurs années une autre façon de consommer de la nicotine et elle apparaît comme une bonne solution provisoire pour arrêter les produits du tabac", a commenté mardi auprès de l'APM le président de l'OFT, le Pr Bertrand Dautzenberg. "L'objectif reste de quitter définitivement le tabac. Mais il est possible avec la cigarette électronique de le faire en douceur, avec plaisir."
L'OFT a initié ce travail pour "aboutir à un consensus sur la conduite à tenir par les professionnels de santé" qui sont "parfois en porte-à-faux pour répondre" à leurs patients, faute d'études probantes et d'une bonne connaissance personnelle de ce produit.
Cet "avis d'experts" a été essentiellement fondé sur l'écoute des usagers et de leurs pratiques. "Nous nous sommes également reposés sur les données de l''evidence-based medecine' mais les publications restent limitées et les enquêtes sont souvent biaisées", fait observer le Pr Dautzenberg.
Le fondement de ces recommandations repose dans le premier constat de cet avis: "Avec 73.000 décès annuels, le tabagisme est la première cause de mortalité évitable en France en 2014. Tout ce qui le fait régresser est bénéfique à la santé publique".
"L'objectif est d'aider un plus grand nombre de fumeurs à quitter le tabac en permettant aux différentes méthodes de s'allier", souligne le pneumologue. Et du tabac sous toutes ses formes, a-t-il ajouté, interrogé par l'APM sur le "vaporisateur" de tabac lancé en France il y a une dizaine de jours par Japan Tobacco.
Les experts distinguent cinq principales situations et proposent pour chacune une stratégie thérapeutique. D'abord, pour le fumeur qui envisage d'arrêter au moyen de l'e-cigarette, ils proposent d'"exposer et proposer les méthodes médicales efficaces, tout en restant ouvert à la demande du fumeur d'utiliser la cigarette électronique".
Pour le "vapoteur" qui garde quelques cigarettes, il faut "l'aider à éliminer les dernières cigarettes" et, face au fumeur en sevrage qui n'arrive pas à éliminer les dernières cigarettes, les remplacer par la cigarette électronique pour faciliter "l'arrêt total peut être une option".
Un "vapoteur" exclusif, qui se pose ou non la question de l'arrêt, peut être aidé par les professionnels de santé dans une démarche de sevrage complet de la nicotine, "dès lors qu'il n'existe plus de risque significatif de retour au tabagisme".
Enfin, l'ex-fumeur, l'ex-vapoteur et le non-fumeur ne doivent plus toucher à la cigarette électronique.
Pour les experts, les méthodes d'arrêt du tabac validées -les thérapies cognitivo-comportementales, l'entretien motivationnel, les substituts nicotiniques et les médicaments de prescription- restent "la prise en charge de première intention des fumeurs".
"Dans l'accompagnement thérapeutique, la cigarette électronique n'est envisageable que chez le fumeur qui ne veut pas ou n'a pas pu arrêter avec les traitements validés ou qui est demandeur de son utilisation, ou qui a déjà commencé à l'utiliser."
BIEN CHOISIR SA E-CIGARETTE
Les professionnels de santé doivent aussi expliquer aux candidats au "vapotage" dans une démarche d'arrêt du tabac "la nécessité de bien choisir sa cigarette électronique et ses e-liquides pour en optimiser l'usage à chaque étape et augmenter ainsi ses chances de remplacer totalement les cigarettes", par exemple en veillant à bien adapter les doses de nicotine du liquide aux besoins.
Ils abordent également quelques situations particulières (grossesse, chirurgie, malades cardiaques) et rappellent la toxicité de la nicotine, formulant des recommandations concernant les accidents de manipulation de l'e-cigarette et des liquides de recharge.
Considérant que la cigarette électronique, même sans nicotine, "pourrait contribuer à renormaliser le tabac dans notre société et favoriser l'initiation, en particulier chez les adolescents", les experts jugent qu'il "justifié que sa vente soit interdite aux mineurs et que sa publicité soit interdite".
En revanche, ils n'abordent pas, dans cet avis, l'usage de l'e-cigarette dans les lieux publics, notamment dans les structures de soins publiques ou privées, pour certains patients hospitalisés en psychiatrie ou en centre de soins palliatifs. "Un avis sur ce thème serait cependant nécessaire pour éclairer les décisions à prendre".
Lors d'une intervention mardi matin aux Amphis de la santé, colloque co-organisé par l'Association des cadres de l'industrie pharmaceutique (Acip), le Quotidien du médecin et l'Essec, le directeur général de la santé (DGS), Benoît Vallet, a estimé qu'il fallait avoir une attitude "homogène" entre la cigarette classique et la cigarette électronique dans les lieux publics, comme le font par exemple les compagnies aériennes. Une mesure sur l'interdiction de "vapoter" dans les lieux publics pourrait être prise dans le cadre de la stratégie nationale de santé, a-t-il indiqué.
L'avis d'expert a été élaboré notamment avec le soutien de Pierre Fabre qui n'y a participé "en aucune façon", indique l'OFT. Le laboratoire commercialise les gammes de substituts nicotiniques Nicopatch* et Nicopass*.