Pour ou contre la cigarette électronique ? ma réponse à Gérard Audureau
Publié le 8 Mars 2013
Cher Gérard,
Je crois qu’il ne faut pas se tromper de débat. On est tous d’accord que le but principal c’est qu’un grand nombre de fumeurs arrêtent de fumer. C’est le fait d’inhaler de la fumée de tabac qui est dangereux, pas le fait d’inhaler de la nicotine.
Je pense que tu caricatures trop la réalité. Les vendeurs de e-cigarette, en tout cas en France, mais je crois aussi en Europe, sont conscient du rôle qu’ils jouent et ne prétendent pas comme tu le dis tromper le consommateur. Il existe une déontologie portée par le collectif des acteurs de la cigarette électronique http://www.cace-cigarette-electronique.com/ .
La cigarette électronique n’est pas un médicament, et ne doit pas le devenir de force. Elle n’est pas perçue comme telle par ses utilisateurs, et ne doit pas être présentée comme telle par les vendeurs (CACE le revendique). Elle doit rester un produit de consommation courante, contrôlé comme il se doit selon les règles européennes, avec des contrôles qualité et de sécurités respectant les normes en vigueur. Mais, ce n’est pas non plus un produit du tabac, et en conséquence ne doit pas subir les mêmes restrictions, sauf éventuellement l’interdiction de l’utiliser dans les lieux publics si les études montrent que la vapeur passive est nocive pour l’entourage. Rien n’étant définitif de ce côté là.
Je suis personnellement gêné par le fait que certains e-cigarettes ressemblent trop à des cigarettes. Ceci pourrait être réglementé si nécessaire. La majorité des utilisateurs utilisent plutôt des dispositifs que l’on devrait plutôt appeler des vaporiseurs ou vaporisateurs personnels (VP) qui sont loin de ressembler à une cigarette, et je préfère cela. Par ailleurs, si l’industrie du tabac s’y intéresse, c’est soit pour faire en sorte d’enterrer le produit, soit parce qu’elle se dit qu’il est peut-être temps de s’y mettre car la cigarette conventionnelle est menacée.
Il existe effectivement de nombreux modèles de e-cigarettes, mais je pense que cela va s’atténuer avec le temps, les utilisateurs faisant eux-même une sélection naturelle des produits. Il est d’ailleurs constaté partout, y compris dans certaines études scientifiques, que la qualité des produits s’améliore (dispositifs et e-liquides).
Enfin, sur la question de l’initiation au tabagisme dont on nous rabat les oreilles depuis quelques temps, c’est un faux problème, le dernier argument lorsqu’on n’en a pas vraiment de solide à opposer. Toutes les études sérieuses (faites à l’étranger) montrent qu’il y a effectivement des adolescents qui essayent la e-cigarette (tout comme ils essayent la cigarette, tellement plus facile à se procurer partout dans le monde, même si l’on n’a pas l’âge légal… tu sais très bien à quoi je fais allusion), mais dans des proportions très faibles. Pour l’instant l’utilisation courante chez les adolescents est anecdotique, et elle concerne en priorité ceux qui fument déjà. Mais surtout, il ne faut pas se tromper là encore de problème. Ce n’est pas en empêchant les fumeurs d’avoir accès à des produits moins dangereux (rappelons-nous l’exemple du snus suédois, interdit en Europe pour les mêmes raisons d’initiation chez les jeunes), mais surtout en omettant de leur dire que ces produits sont moins dangereux (ou comme l’OMS en disant à tort que tous les produits du tabac sont dangereux, sans aucune distinction de degré de dangerosité), que l’on va régler le problème du tabagisme, qui comme tu le sais, et on est bien d’accord là-dessus, cause bien trop de morts pour que l’on reste dans cette situation de status quo!
En attendant, je t’invite à lire les résumés scientifiques de la conférence de la Society for Research on Nicotine and Tobacco (SRNT) qui aura lieu la semaine prochaine à Boston : http://www.srnt.org/conferences/SRNT_2013_Abstracts_H.pdf , tu y trouveras de nombreux résumés sur la e-cigarette. La science est à l’œuvre !
Bien amicalement, Jacques Le Houezec