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Publié le 21 Mai 2015

Rappel

Au mois de janvier, une Lettre publiée dans le NEJM a provoqué une réaction démesurée dans la presse. Il faut rappeler, qu'une Lettre est d'un format très court, au contraire d'un article scientifique, et ne permet pas de détailler la méthodologie utilisée. Or, c'est bien là le problème.

Comme le rappelait à l'époque le Dr Farsalinos : "Selon les renseignements donnés par l'auteur dans un échange de courriels, l'atomiseur avait une résistance de 2,1 Ohm. Cela signifie qu'à 3,3 volts, la puissance délivrée était d'environ 5,5 watts, et qu'à 5 volts elle était de 12 watts. Il est plus qu'évident que les résultats montrant des niveaux très élevés de formaldéhyde sont le résultat d'une surchauffe. Le manque d'expérience sur les e-cigarettes, et aucun contact avec les utilisateurs peuvent entraîner de telles résultats erronés et irréalistes, ce qui peut créer la confusion et la désinformation, tant dans la communauté scientifique, que chez les utilisateurs et les utilisateurs potentiels d'e-cigarette. Enfin, il est extrêmement important que chaque étude évaluant la chimie de la vapeur d'e-cigarette se doit de mentionner en détail l'équipement utilisé."

Le Dr Farsalinos a donc réalisé une autre étude afin de démontrer que les conditions utilisées dans l'étude américaine n'étaient pas réalistes.

L'article sera disponible gratuitement pendant 1 mois sur le site d'Addiction.

Les aldéhydes (dont fait partie le formaldéhyde) sont émis dans la vapeur de vaporisateur personnel (VP) lorsque le liquide subit une dégradation due à une trop forte température. Cependant, ce phénomène est connu de tous les vapeurs sous le nom de "dry hit" ou "dry puff" (bouffée sèche), et bien évidemment dès qu'ils le détectent, ils n'inhalent pas cette bouffée (ce que visiblement les auteurs de la Lettre au NEJM ignoraient). Ce phénomène se produit lorsque la résistance (coil) n'est pas suffisamment alimentée en liquide, ce qui provoque une surchauffe de la résistance (ou encore lorsque le flux d'air est insuffisant).

Afin de démontrer ce phénomène, le Dr Farsalinos a réalisé une étude avec deux conditions d'alimentation de la résistance en liquide, et à 4 puissances (Watts) différentes. Pour cela il a monté un Kayfun Lite plus, avec soit 2 mèches (wick) de silica de 3 mm (A1), soit 1 seule mèche (A2), le premier (A1) étant censé délivrer plus de liquide à la résistance, et donc moins susceptible de produire de "dry hit" à forte puissance. L'atomiseur A2 représente le type d'atomiseurs courants du marché, tels que ceux utilisés dans l'étude américaine. Les atomiseurs ont été testés sur une Hana Modz DNA 40 a 4 niveaux de puissance: 6,5 W, 7,5 W, 9 W et 10 W. Le liquide utilisé était constitué de 45% de PG, 45% de VG, 8% d'eau et 2% de nicotine (20 mg/ml). Ce choix de liquide a été fait, car selon une étude, il est susceptible de produire plus d'aldéhydes que du 100% PG ou 100% VG (Kosmider, L., Sobczak, A., Fik, M., Knysak, J., Zaciera, M., Kurek, J. et al. Carbonyl compounds in electronic cigarette vapors: effects of nicotine solvent and battery output voltage. Nicotine Tob Res 2014; 16: 1319-1326.).

Mais d'abord, demander aux intéressés !

Avant de commencer l'étude des émissions dans la vapeur, le Dr Farsalinos a demandé à 7 vapeurs confirmés de prendre 4 bouffées de 4 s toutes les 30 s, sur chaque atomiseur, aux 4 niveaux de puissances étudiés. Ils ont tous rapporté un phénomène de "dry hit" avec l'atomiseur A2 à 9 W et 10 W (mais pas à puissance plus faible), mais aucun avec l'atomiseur A1 quelle que soit la puissance.

Puis des mesures on été réalisées avec une machine à vaper. Trois séries de 60 bouffées ont été analysées séparément. Les analyses de la vapeur sont les suivantes (notez que les valeurs présentées pour la vapeur correspondent à 10 bouffées):

Les émissions d'aldéhydes sont bien dues au phénomène de surchauffe

La plupart des études précédentes n'ont pas contrôlé ces facteurs importants.

C'est la première étude qui quantifie les émissions d'aldéhydes à différentes puissances (W) dans des conditions normales et de "dry hit", déterminées à l'avance par des vapeurs confirmés. Elle démontre qu'il est effectivement possible de générer des émissions d'aldéhydes avec le VP, mais que cela ne se produit que dans les conditions de "dry hit". Au contraire, en conditions d'utilisation normale (avec une alimentation en liquide et en air correcte), les émissions d'aldéhydes sont minimes, même à des puissances élevées, et bien inférieures à celles de la fumée de cigarette.

Les nouvelles générations de batteries ou de Mods peuvent être utilisées à de fortes puissances, et sont recherchées par les vapeurs confirmés, mais elles sont en général associées à des atomiseurs qui ont la capacité d'apporter suffisamment de liquide à la mèche. Il n'existe donc pas de puissance absolue au-delà de laquelle les conditions de surchauffe se produisent [ndlr: cela va rassurer les chasseurs de clouds et ceux qui utilisent des drippers]. Il suffit d'adapter le bon atomiseur sur la bonne batterie ou le bon Mod.

Ce que cette étude montre aussi, c'est qu'il n'est pas possible de faire des mesures d'émissions dans la vapeur de VP, sans auparavant faire tester les conditions employées par des utilisateurs. Cela vaut aussi pour la durée des bouffées, ou l'intervalle entre deux bouffées.

Toujours, demander aux intéressés !

Les chercheurs qui font se genre d'études ne sont pas tous des experts de la vape, et c'est bien ce qu'on leur reproche. Avant de se lancer dans ces études, il faut savoir de quoi l'on parle et connaître le matériel. En particulier, il est absurde de ne tenir compte que du voltage délivré par le VP. L'énergie délivrée à une résistance s'exprime en Joule (J), et est définie par la puissance (W) multiplié par le temps (s) (E=J x s). La puissance (W) est définie par le voltage au carré divisé par la résistance (Ohms) ou V2/R. Beaucoup d'études se sont limitées à rapporter uniquement le voltage (comme l'étude américaine citée au début de ce post), alors qu'il faudrait présenter la puissance (W), car cela tient compte de la valeur de la résistance, ainsi que la durée de la bouffée (ce qui permet de calculer l'énergie délivrée en Joule).

[ndlr: Il est à noter, qu'une nouvelle génération de Mods (sous format box électronique) est en train de voir le jour, elles permettent de contrôler et de limiter la température atteinte par la résistance, et permettrons d'éviter ce phénomène de "dry hit".]

Voilà qui devrait rassurer les utilisateurs et les autorités

Il ne s'agit pas de dire que le risque de vaper est nul, mais qu'il est minime. Selon une étude récente sur l'exposition au formaldéhyde dans l'air ambiant, il a été déterminé qu'une limite de 0.1 ppm (125 µg/m3) protège même les personnes les plus susceptibles, tant des effets irritants que d'un quelconque risque de cancer (Golden, R. Identifying an indoor air exposure limit for formaldehyde considering both irritation and cancer hazards. Crit Rev Toxicol 2011; 41: 672-721.). Considérant un volume respiratoire quotidien d'environ 20 m3 d'air, cette limite de 0.1 ppm représente l'équivalent de plus de 2500 bouffées* par jour [ndlr: soit 4 à 10 fois le nombre de bouffées prises par un vapeur quotidiennement]. De même, l'OMS préconise une limite pour le formaldéhyde de 80 ppb (100 µg/mL), ce qui représente une exposition quotidienne équivalente à plus de 2000 bouffées*. Pour les autres aldéhydes, les limites acceptables sont moins claires, et diffèrent selon les organisations. Il existe donc peut-être un risque résiduel à l'exposition aux aldéhydes associée à l'utilisation du VP, mais dans tous les cas ce risque est minuscule comparé à celui de la cigarette.

La conclusion du Dr Farsalinos, est qu'il peut effectivement se produire des émissions d'aldéhydes dans un VP, mais seulement dans les conditions de "dry hit", et que les utilisateurs connaissent bien ce phénomène et n'y sont donc pas exposés lors d'une utilisation normale de leur matériel, même lorsqu'ils utilisent des VP de dernières générations pouvant délivrer de forte puissances.

 

* les valeurs de formaldéhyde retrouvées dans le tableau correspondent à 10 bouffées, donc dans 1 bouffée il y a moins de 1 µg de formaldéhyde dans les conditions normales d'utilisation.

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Publié le 17 Mars 2015

Jeudi, je serai à Londres pour parler lors d'une réunion organisée par Cancer Research UK. J'y présenterai des données de Konstantinos Farsalinos qui vont bientôt être publiées.
Voici le programme:

CRUK E-cigarette Research Workshop 1: Mechanisms

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Publié le 22 Janvier 2015

Mise à jour à 21h45

Voici un schéma qui explique simplement les résultats de cette étude:

Désinformation: la différence entre une étude en laboratoire et la réalité

Mise à jour à 21h45

Voici un schéma qui explique simplement les résultats de cette étude:

 

 

Mise à jour à 15h10

Sur le blog du Dr Farsalinos: Verified: formaldehyde levels found in the NEJM study were associated with dry puff conditions. An update

"Selon le Post Reddit et le courriel de l'auteur, l'atomiseur avait une résistance de 2,1 Ohm. Cela signifie que à 3,3 volts, la puissance délivrée est d'environ 5,5 watts, et à 5 volts elle était de 12 watts. Il est plus qu'évident que les résultats montrant des niveaux très élevés de formaldéhyde sont le résultat d'une surchauffe. Le manque d'expérience sur les e-cigarettes et aucun contact avec les utilisateurs peuvent entraîner de telles résultats erronés et irréalistes, ce qui peut créer de la confusion et la désinformation tant dans la communauté scientifique et entre les utilisateurs et utilisateurs potentiels d'e-cigarette. Enfin, il est extrêmement important que chaque étude évaluant la chimie de la vapeur d'e-cigarette se doit de mentionner en détail l'équipement utilisé.

Je dois d'abord dire que je ai l'expérience de recherches personnelles sur l'utilisation d'atomiseurs à résistance en haut. J'ai essayé d'utiliser un tel clearomiseur dans mon étude évaluant les niveaux de nicotine dans le plasma après utilisation d'e-cigarette. Dans cette étude, nous avons utilisé une batterie EVIC fixée à 9 watts. Malheureusement, il était impossible pour la plupart des vapoteurs d'utiliser le clearomiseur selon leurs conditions préférées, en raison d'un goût de brulé (dry-puff). Seule une petite minorité qui prenaient des bouffées très courtes ont été en mesure de l'utiliser à 9 watts. Donc, je ai dû changer le clearomiseur pour un Evod à résistance en bas, qui a très bien fonctionné à 9 watts. En fait, la durée moyenne de bouffée des participants à cette étude était de 3,5 secondes. Donc, le clearomiseur à résistance en haut utilisé à 9 watts était en surchauffe à une durée de bouffée de moins que les 4 secondes utilisées dans l'étude du NEJM. Ce ne est pas la première fois que le clearomiseur s'est avéré insuffisant et a abouti à un phénomène de dry-puff, immédiatement détecté par les vapoteurs; dans notre étude de topographie de la vape j'ai spécifiquement mentionné: «À l'origine notre intention était de tester un autre clearomiseur (" eGo-C ", Joyetech); Toutefois, certains utilisateurs ont connu une surchauffe de l'atomiseur et un phénomène connu sous le nom "dry-puff" (désagréable, goût de brûlé causée par une arrivée insuffisante de liquide au niveau de la résistance, de sorte que le taux d'évaporation est plus élevé que l'arrivée de liquide; voir la section Discussion pour plus de détails). Ils ont dû abaisser la durée de bouffée et augmenter l'intervalle inter-bouffées afin d'éviter ce phénomène. En réponse à cela, la eGo-C a été remplacé par l'"Epsilon" et on a demandé aux participants de revenir pour des enregistrements avec le nouveau clearomiseur. Tous les résultats avec l'atomiseur eGo-C ont été rejetés ". Les auteurs de l'étude NEJM auraient dû lire notre étude et auraient dû connaître l'existence de ce phénomène."

 

Mise à jour 11h05, 22/01/15*

Une fois de plus certains journalistes sautent à pieds joints sur une étude, cherchant à dénigrer le vaporisateur de nicotine (VP), en utilisant des titres sensationnels, et sans prendre la peine d'analyser réellement la validité de cette étude.

Une lettre, publiée dans le New England Journal of Medicine, détaille une expérience faite en laboratoire en utilisant un vaporisateur de seconde génération à 3,3 et à 5,0 volts, avec une durée de bouffée de 4 secondes, sans préciser le type et la valeur de la résistance employée. A 3,3 volts ils n'ont pas pu mesurer d'émission de formaldéhyde (substance cancérigène), mais à 5,0 volts ils ont mesuré des quantités supérieures à celles émises par une cigarette de tabac.

Sur son blog, le Dr Farsalinos critique sévèrement cette étude, et propose tout d'abord une autre interprétation de ce qui a été réellement mesuré. Selon lui, "les auteurs n'ont pas trouvé du formaldéhyde [ndlr: dans la vapeur produite], mais des hémiacétals de formaldéhyde."

Un hémiacétal est un groupe fonctionnel formé par réaction d'un aldéhyde et d'un alcool ou un composé chimique contenant ce groupe fonctionnel. Dans le cas du VP, il s'agit de formaldéhyde-propylène glycol ou de formaldéhyde-glycérol (on rappelle ici que le propylène glycol et la glycérine végétale sont des alcools, et non des corps gras!). Or, selon le Dr Farsalinos, "il n'existe aucune preuve que les hémiacétals soient toxiques ou cancérigènes. Il est même possible que la formation d'hémiacétals protège des dommages causés par le formaldéhyde. Et cependant, les auteurs les ont considérés comme du formaldéhyde et ont calculé un risque de cancer."

Le problème de ce type de recherches est qu'elles sont conduites par des personnes ne connaissant pas grand chose à la vape. Ce qui est important pour analyser ces résultats ce n'est pas les volts délivrés par la batterie, mais la puissance en watts appliquée à la résistance. Les auteurs ne mentionnent même pas la valeur de la résistance qu'ils ont utilisé. Encore une fois, le Dr Farsalinos, qui a fait de nombreuses études sur le sujet, essaye d'y voir plus clair. Il utilise pour cela les données présentées dans l'étude. Il dit: "Les auteurs rapportent que 5 mg de liquide ont été vaporisés à 3,3 volts. Selon des mesures que j'ai réalisées, une telle consommation de liquide correspond à des bouffées de 4 secondes à 6-7 watts. La résistance devait donc être de 1,6 à 1,8 ohms. Ce qui à 5 volts donne une puissance de 14-16 watts. Ce qui est une valeur très élevée pour la plupart des atomiseurs du commerce (exceptés certains reconstructibles qui peuvent supporter une telle puissance). Il est donc évident que l'atomiseur a été surchauffé, ce qui bien sûr résulte en une production très élevée de formaldéhyde. Ce que les auteurs ignorent, c'est que ces conditions, connues sous le nom de dry-puff, sont facilement détectées par les utilisateurs de VP. Cela produit un goût insupportable, et personne n'utilise un VP dans ces conditions, et n'est donc jamais exposé à de telles concentrations de formaldéhyde."

Voilà pourquoi il faut toujours être critique lorsque l'on lit une étude scientifique publiée, et surtout lorsqu'elle est accompagnée d'un dossier de presse pour la faire connaître. C'est notre rôle de scientifique, on ne prend jamais les résultats d'une étude (surtout ceux rapportés dans le résumé) pour argent comptant. Cela aurait dû d'ailleurs être fait par les relecteurs qui ont accepté la publication de cette lettre dans le NEJM, ce qui ne semble pas être le cas. C'est aussi pour cela que les journalistes devraient, s'ils n'ont pas la formation nécessaire pour cela, toujours faire appel à un expert avant de reprendre tous en chœur une dépêche de l'AFP (ce qui est de plus en plus monnaie courante, car il faut réagir vite pour être le premier à publier!). C'est dommage que cette course à l'information soit généralisée à ce point, car elle n'est bonne pour personne, ni pour le lecteur, qui se retrouve en fait désinformé et qui va peut-être hésiter à utiliser un VP s'il est fumeur, ni pour les journaux qui se décrédibilisent à long terme.

Dans le cas présent, la dépêche de l'AFP contenait bien un commentaire de Peter Hajek, modérant les résultats de cette étude. Cela n'a pas empêché certains journaux de mettre un titre bien racoleur et qui est la seule chose que les gens vont retenir (n'est-ce pas BFMTV, et même Le Monde ?). Pourtant hier, le Ministre de la Santé du Quebec vantait les mérites du VP, ce que je n'ai vu repris nul part dans nos journaux, c'est bien dommage.

* Les chercheurs ont utilisé un clearomiseur CE4 avec une résistance de 2,1 ohms, sur une iTaste VV. Personne n'utilise une tension de 5V sur un tel clearo, ça brûle, c'est sûr!
https://www.reddit.com/r/electronic_cigarette/comments/2t8lo7/researchers_find_high_levels_of_cloaked_form_of/cnwwl8v

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Publié le 8 Décembre 2014

Mise à jour du 8 décembre (voir * ci-dessous)

Jeudi 27 novembre, toute la presse mondiale s'est fait l'écho d'une soi-disant étude japonaise montrant des taux de formaldéhyde dans la vapeur de cigarette électronique 10 fois supérieurs à ceux retrouvés dans la fumée de cigarette.

Et tout le monde de tirer à boulets rouges sur le vaporisateur de nicotine avec des titres mensongers du type "La cigarette électronique est, elle aussi, cancérigène" ou "Les cigarettes électroniques plus cancérigènes que le tabac?".

Tous reprennent en chœur une dépêche de l'AFP. Sans prendre le temps bien sûr d'aller se renseigner sur l'étude en question.

Pourtant le même jour, le Dr Farsalinos, qui est l'Editeur invité d'un numéro spécial sur la cigarette électronique dans cette revue scientifique, fait une analyse critique de cette étude et rapporte les propos qu'il a échangé avec le Pr Kunugita, l'un des auteurs de l'étude, et qui a rédigé un rapport pour le Ministère de la santé japonais. C'est suite à la remise de ce rapport que le Pr Kunugita a donné une interview où il a mentionné "In one brand of e-cigarette the team found more than 10 times the level of carcinogens contained in one regular cigarette" ["dans une marque de e-cigarettes l'équipe a trouvé des niveaux de carcinogènes 10 fois supérieurs à ceux contenus dans une cigarette normale"].

Alors que tout le monde reprend en chœur le mot "carcinogènes" au pluriel, l'interview ne mentionne que le formaldéhyde (qui est une substance à laquelle tout le monde d'ailleurs est exposé, car c'est un polluant courant dans les habitations). Lorsque l'on analyse l'étude japonaise citée plus haut, on trouve en fait une moyenne de 4.2 µg de formaldéhyde pour 10 bouffées, et sur 13 marques testées, celle produisant le plus de formaldéhyde a donné une valeur de 34 µg/10 bouffées. Cependant, l'étude n'a pas comparé ces taux avec ceux de la cigarette de tabac. Le Dr Farsalinos l'a fait dans sa critique. Il se rapporte à une étude canadienne de 2008 qui a montré un taux moyen de 200 µg par cigarette (voir le tableau ci-dessous). Soit 50 fois plus que la moyenne des 13 marques de cigarettes électroniques testées dans l'étude japonaise, et au pire, 6 fois plus que celle ayant produit la plus grande quantité (34 µg/10 bouffées). Il faut noter aussi, que la fumée secondaire d'une cigarette (celle impliquée dans le tabagisme passif, et qui n'existe pas pour le vaporisateur de nicotine) produit plus de 800 µg de formaldéhyde!

En tout état de cause, il n'est pas scientifiquement valide de prendre une valeur parmi les 13 et d'accuser l'ensemble des produits testés (c'est pourtant ce qu'avait fait sans vergogne 60 millions de consommateurs en 2013, et qui lui avait valu une critique acerbe de la part des scientifiques).

Journalisme: tourner 7 fois sa souris dans sa main avant de faire un copié-collé d'une dépêche de l'AFP !

Mais en fait, le Dr Farsalinos rapporte d'autres propos du Pr Kunugita qui ont été repris dans le communiqué de presse de l'AFP. Son équipe de recherche a testé d'autres produits et il semble qu'ils aient trouvé une valeur 10 fois supérieure (1600 µg/15 bouffées) avec une autre marque de e-cigarettes, et c'est cela qui a été repris. Cependant, ces données ne sont publiées nul part, donc non évaluée, vérifiée et confirmée par d'autres experts, comme ce doit être le cas pour toute publication scientifique.

Il est évident, que se focaliser sur une substance parmis les dizaines de carcinogènes présents dans la fumée de tabac n'est rien d'autre que de la désinformation. Comme le souligne le Dr Farsalinos, même si la vapeur de cigarette électronique contenait des quantités similaires ou supérieures de formaldéhyde par rapport à une cigarette de tabac, elle ne contient ni monoxyde de carbone (CO), ni particules fines solides, ni gaz oxydants, ni la majorité des autres substances toxiques de la fumée de tabac. Cela fait que même si le risque résiduel du vaporisateur de nicotine n'est pas nul (le risque zéro n'existe pas d'ailleurs), il est considérablement moindre (de plusieurs ordres de grandeur) que le risque tabagique. C'est cela que les fumeurs sont en droit de savoir pour qu'ils puissent prendre une décision éclairée sur le fait qu'il choisissent ou non de vapoter. Ce n'est pas ce que leur offre les médias, bien aidés d'ailleurs par certains chercheurs qui déforment les résultats de la science* dans le but de s'opposer à ce produit en utilisant tous les arguments possibles (comme celui de l'initiation des jeunes qui les conduiraient soi-disant vers le tabagisme, ce qu'aucune enquête à l'heure actuelle n'a pu démontrer).

Heureusement, aujourd'hui certains journalistes, moins pressés sans doute de faire du sensationalisme, ont présenté cette étude d'une façon plus critique. Je les en remercie, et je les cite donc:

http://www.slate.fr/story/95171/cigarette-electronique-cancer-fausse-alerte-japonaise

http://www.lematin.ch/suisse/Vapoter-est-moins-risqu-que-fumer/story/31224090

http://news.doctissimo.fr/Sante/Cigarette-electronique-et-cancer-et-si-l-alerte-japonaise-n-etait-q-un-petard-mouille-38818

 

Pour ceux qui voudraient partager ce document, voici le pdf:

https://www.dropbox.com/s/yc3x3lnongi7rjs/Journalisme%20-%20touner%207%20fois%20sa%20souris.pdf?dl=0

 

Mise à jour du 8 décembre

* Une mise au point par Robert West publiée dans le journal Addiction, réclamant un traitement honnête des données scientifiques sur le VP. Il insiste clairement sur la désinformation que produisent certaines publications venant de chercheurs clairement opposés au VP et n'hésitant pas à déformer les données scientifiques pour atteindre leur but. Une liste de publications importantes est aussi mentionnée. (voir ici une traduction en français)

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Publié le 10 Septembre 2014

L'article (en anglais) critiquant la position de l'OMS, que nous avons publié dans Addiction la semaine dernière, est en libre accès pendant 1 mois...
http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/add.12730/pdf

Vous pouvez aussi lire l'éditorial de Robert West
http://bjgp.org/content/64/626/442.full

J'essayerai de faire un petit résumé en français ces prochains jours.

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Publié le 26 Août 2014

L'OMS a publié aujourd'hui un document de travail en vue de la réunion des Parties de la Convention cadre (CCLAT) à Moscou en octobre prochain:

http://apps.who.int/gb/fctc/PDF/cop6/FCTC_COP6_10-fr.pdf

C'est une révision d'une version précédente encore plus virulente et opposée au vaporisateur de nicotine (VP), qui semble avoir pris en compte quelques critiques qui avaient été adressées à l'OMS, en particulier notre lettre envoyée à la Directrice, démontrant la déformation des données scientifiques, utilisées afin de leur faire dire ce qu'elles ne montraient pas. C'est indigne de scientifiques, tel Stan Glantz (co-auteur du rapport qui a servi de base à ce document publié aujourd'hui), de déformer à ce point les données, ou de ne choisir que celles qui l'arrange, pour atteindre un but pré-fixé, en l'occurrence mettre des bâtons dans les roues du VP, censé renormaliser le tabagisme ou inciter les jeunes à commencer.

Le problème est que rien de ce qui est avancé par Stan Glantz, ou par ce rapport largement inspiré, n'est supporté par les données scientifiques existantes.

Ni l'hypothèse de la porte d'entrée en tabagisme des jeunes, que même les données du CDC, utilisées par Glantz, ne montrent pas lorsqu'on les analyse vraiment, ni d'ailleurs les données françaises (Paris sans tabac) ou anglaises (STS), ni la dangerosité de la nicotine exagérée comme toujours, ni l'exposition passive au VP, ne sont basés sur des preuves solides, mais des données déformées et utilisées dans le but de faire peur et d'atteindre un objectif pré-établit.

Certaines critiques des articles de Glantz (dans JAMA Pediatrics, ou Circulation) sont déjà parues. D'autres arrivent, dont un Editorial de Robert West dans le British Journal of General Practice à paraître lundi 1 septembre, et une critique du rapport de Glantz pour l'OMS à paraître la semaine prochaine dans Addiction (j'en suis l'un des co-auteurs), qui reprend les éléments de notre lettre à l'OMS.

Encore une fois, ceci n'est qu'un document de travail en vue de la COP6, à nous d'être suffisamment convaincants auprès des participants (représentants des différents pays ayant ratifié la Convention) et à continuer d'apporter des réponses scientifiques par de nouvelles études, afin que le document final ne soit pas aussi biaisé, et laisse au VP la possibilité de livrer les avantages potentiels de Santé publique, que même l'OMS reconnaît dans ce texte (paragraphe 34).

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Publié le 13 Juin 2014

Rencontre entre experts internationaux de la vape à Milan

Mercredi 11 juin, s'est déroulé à Milan une conférence intitulée «La cigarette électronique, point de vue sur l'économie, la santé et la culture" réalisé en collaboration entre la Fiesel, l'association des vapoteurs italiens et la LIAF, la Ligue anti-tabac italienne.

Une salle comble a écouté attentivement l'intervention de conférenciers experts de différentes régions du monde afin de discuter des avantages que la cigarette électronique peut apporter à la lutte antitabac et la prévention des maladies dues au tabagisme.

S'exprimant au nom de la Ligue anti-tabac italienne, Riccardo Polosa dans sa présentation a souligné que les campagnes médiatiques lancées au cours des dernières années ont répandu dans l'imaginaire collectif une «biographie trompeuse» de la cigarette électronique. Le soi-disant "bruit du Web" a déformé un instrument qui a immédiatement montré un excellent potentiel pour faire arrêter de fumer des millions de fumeurs: «C'est irresponsable de la part des médias et des autorités d'insister sur les messages alarmistes sur la e-cig quand les preuves scientifiques indiquent la direction opposée - dit Polosa - les sociétés scientifiques et médicales devraient applaudir des deux mains ce produit extraordinaire au lieu de le diaboliser sous le couvert du principe de précaution."

Jacques Le Houezec, consultant en santé publique à Rennes, en France, a présenté des données qui montrent clairement que la cigarette électronique fait déjà diminuer le nombre de fumeurs dans des pays comme la Grande-Bretagne ou la France, où sa propagation a rencontré moins d'opposition. "La cigarette électronique est un produit perturbateur qui a le potentiel de sauver des millions de vies - dit-il - et «le symbole d'une révolution en santé publique, qui a surgi spontanément grâce aux consommateurs, sans coût supplémentaire pour l'Etat et ses contribuables. Il est probable que la cigarette électronique pourrait dans un avenir proche remplacer toutes les «blondes» réalisant ainsi un objectif impossible à atteindre avec les mesures de contrôle du tabac traditionnelles adoptée jusqu'ici."

Selon Umberto Tirelli, oncologue de renommée internationale, qui fait face depuis de nombreuses années au problème des cancers causés par le tabagisme, insiste sur le fait que les femmes en sont les nouvelles victimes: "Chaque année, 6000 femmes développent un cancer du poumon, le double de leurs mères. Dans quelques années, - dit-il - ce sera la principale cause de décès pour elles." Et il poursuit: "Avec l'introduction de la cigarette électronique et l'élimination des substances cancérogènes présentes dans les cigarettes classiques il y a une réduction substantielle de l'exposition à ces agents cancérigènes. En France et en Angleterre, où il y a aussi une augmentation du nombre de vapoteurs, par exemple, il y aura une réduction de certaines des maladies associées au tabac et en particulier des tumeurs. J'espère que même en Italie - a conclu Tirelli - avec l'abandon de la diabolisation de la cigarette électronique, nous pourrons obtenir les mêmes résultats."

Enfin, Konstantinos Farsalinos, un expert reconnu de la cigarette électronique, a présenté des données sur la toxicité des liquide: "Les études toxicologiques ont confirmé que le risque de l'inhalation de vapeur de cigarette électronique est beaucoup plus faible que celui de la fumée de tabac. En particulier, on sait que la très grande majorité des substances toxiques produites par les cigarettes conventionnelles ne sont pas présentes dans l'e-cig. Bien sûr, l'amélioration est encore possible et donc des études ciblées sont nécessaires pour augmenter la sécurité de certains produits"- a ajouté Farsalinos. Selon le chercheur grec les fumeurs devraient être encouragés à vaper activement: "Les institutions devraient promouvoir l'accessibilité et la compétitivité de ces produits par rapport aux cigarettes conventionnelles."

Dans sa présentation, Sabrina Capozzolo, députée nationale du Parti démocrate, a dit que la taxation de la cigarette électronique au même niveau que celle du tabac a été une grosse erreur, et le résultat d'une politique à court-terme peu consciente de la dynamique complexe de ce secteur de l'industrie "nous allons travailler pour un système fiscal plus équitable qui pourra stimuler le secteur de la production en Italie" a-t-elle déclaré. Certes, une réglementation des produits est nécessaire, mais elle doit être mesurée et tenir compte des avantages pour la santé publique et protéger le "Made in Italy." Nous sommes déterminés à faire en sorte que les producteurs ne souffrent pas d'une taxation inéquitable. Un examen approfondi de la réglementation de ces produits est en cours et nous espérons aboutir d'ici Juillet," a ajouté Madame Capozzolo.

Pour conclure la journée, le président de Fiesel (association des vapoteurs italiens), Massimiliano Federici, a dit qu'il était très heureux des messages positifs et pleins d'espoir apportés par la conférence. "Les éléments de preuve que les experts accumulent et qui ont été clairement illustré aujourd'hui sont de bon augure pour un redressement généralisé dans le secteur en Italie. Certes, plus d'attention et de rigueur devraient être mises en œuvre dans les systèmes de production pour protéger les consommateurs. L'engagement de Fiesel Confesercenti est de veiller à ce que ces recommandations soient traduites dans les faits." Représentant aussi Confesercenti, Angelo Sbarra, a également donné un aperçu sur la propagation des cigarettes électroniques en Italie et à l'étranger.

Les présentations des 4 experts sont téléchargeables sur le site de la LIAF.

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Publié le 12 Mai 2014

J'ai fait une traduction d'un article de la revue Addiction, disponible en libre accès ici:

This is a French translation of the free access article published in Addiction here :

http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/add.12550/full

Il y a un débat en ce moment au sein de la communauté de la recherche sur la nicotine et le tabac, cherchant à savoir si les cigarettes électroniques offrent un moyen de sortir de l'épidémie de tabagisme ou une façon de la perpétuer. Des preuves scientifiques obtenues par des recherches à la conception solide, mises en œuvre et rapportées de façon honnête, sont les meilleurs outils dont nous disposons pour nous aider à prévoir ce que l'avenir nous réserve.

Nous avons un besoin urgent de preuves afin d'informer le débat sur l'impact de la cigarette électronique sur la santé publique, au moment où les législations nationales et internationales se mettent en place. La recherche et les commentaires actuels sur la cigarette électronique, ou dispositif d'administration de nicotine électronique (appelé ici e-cigarette) varient considérablement en qualité, en exactitude, et en objectivité. Bien que ces questions ne soient pas limitées à la communauté de la recherche, nous pensons que les chercheurs doivent mieux montrer l'exemple dans ce domaine. Nous illustrons nos préoccupations avec les trois exemples ci-dessous.

 

L'e-cigarette ne contient pas de tabac

De nombreuses publications et déclarations de chercheurs, d'agences gouvernementales et non gouvernementales, et plus largement les médias, rapportent à tort que l'e-cigarette est un produit du tabac. Par exemple, la e-cigarette a été considérée comme un produit du tabac dans environ un quart des résumés sur l'e-cigarette, lors de la réunion annuelle 2014 de la Société pour la recherche sur la nicotine et le tabac à Seattle [ 1 ]. La même erreur se retrouve également dans la littérature scientifique et dans les écrits des organismes influents. Par exemple, le site internet du Centre américain pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) indique que «les produits du tabac émergents, tels que l'e-cigarette et le narguilé gagnent rapidement en popularité» [ 2 ]. S'il est vrai que la grande majorité des e-cigarettes utilisent une solution contenant de la nicotine qui est extraite de la plante de tabac, ce qui est le cas aussi des substituts nicotiniques (TNS), contrairement aux cigarettes de tabac ordinaires, les e-cigarettes actuellement sur le marché n'utilisent pas de tabac, et ne produisent ni fumée, ni combustion [ 3 ]. En outre, même si des traces de nitrosamines spécifiques du tabac ont été trouvés dans les vapeurs d'e-cigarettes, des traces similaires sont présentes dans les TNS [ 4-7 ]. Cette erreur de catégorisation est exacerbée par les réglementations nationales et internationales, qui incluent l'e-cigarette dans leurs projets de réglementation du tabac. Par exemple, l'Union Européenne propose de réglementer l'e-cigarette au sein de la Directive des produits du tabac [ 8 ]. Nous ne sachons pas que les TNS soient catégorisés en tant que produits du tabac, alors pourquoi les chercheurs classent-ils à tort l'e-cigarette de cette façon? Que ce soit par manque de connaissances, par négligence, ou comme une tentative d'associer l'e-cigarette aux dommages immenses causés par le tabac, la classification des e-cigarettes en tant que produit du tabac est inexacte et inacceptable.

 

Les e-cigarettes représentent une catégorie hétérogène

Une grande partie de la recherche à ce jour a traité l'e-cigarette comme s'il s'agissait d'un seul et même produit. Cependant, une vaste gamme de produits est couverte par le terme e-cigarette. Les différents types d'e-cigarette varient considérablement dans leur fonction, leur contenu, et leur apparence. Par exemple, tandis que l'apparence de certaines e- cigarettes se rapproche énormément de celle des cigarettes de tabac, d'autres n'ont aucune similitude évidente. Les différents types d'e-cigarette varient également dans la façon de délivrer, s'ils en délivre, de la nicotine, et l'exposition à la nicotine dépend aussi de l'utilisateur [ 3,9-11 ]. En outre, les stratégies de marketing et de vente sont diverses et évoluent. Par exemple, au Royaume-Uni, tandis que de nombreux produits sont vendus en ligne, certains produits ne sont disponibles que dans les pharmacies, tandis que d'autres sont vendus aux côtés du tabac dans les magasins. En outre, il existe maintenant une variété d'acteurs dans le marché de l'e-cigarette, y compris l'industrie du tabac. Certains ont remis en question les motifs de participation de l'industrie du tabac dans le marché de l'e-cigarette [ 12 ], et il est nécessaire d'être conscient de leur participation. Pour faire progresser la recherche et le débat, il sera important de reconnaître les différences entre les différents types d'e-cigarette, la variabilité dans la façon dont les individus les utilisent, quelles sont les limites que cela pose à la recherche actuelle, et les implications pour la réglementation. De plus, il sera important de comprendre comment la quantité de nicotine délivrée, le marketing, l'activité des intervenants de l'industrie, et la réglementation, affectent l'utilisation des différents types d'e-cigarette et d'autres produits contenant de la nicotine, par les utilisateurs. Les e-cigarettes ne sont pas un groupe homogène de produits et il est essentiel d'indiquer clairement quel(s) produit(s) a (ont) été étudié(s), et éviter la généralisation à partir de produits spécifiques à la pléthore d'options disponibles.

 

L'e-cigarette est-elle une passerelle vers le tabagisme?

L'une des principales préoccupations au sujet de l'e-cigarette est qu'elle (ou la commercialisation les concernant) pourrait être attrayante pour les enfants qui vont tester l'e-cigarette, puis déplacer cette expérience vers les cigarettes de tabac, et devenir dépendant de la cigarette de tabac (l'hypothèse «passerelle»). Ce fut aussi une préoccupation avec les produits du tabac non fumés, à faible taux de nitrosamines (snus), bien que les preuves aient été hautement contestable alors [13], et l'est de la même manière pour l'e-cigarette [14]. Nous pensons qu'un type de recherche utile serait d'explorer cette hypothèse «passerelle» plus en détail, en se demandant – quelles preuves seraient nécessaires afin de démontrer que l'hypothèse «passerelle» existe bien ? Peut-on établir une définition avec laquelle tous les universitaires seraient d'accord ?

 

Que faut-il faire ?

Nous pensons que les déclarations de la communauté de la recherche doivent être fondées sur les preuves. Alors que les débats animés aident à faire progresser la science et la politique, l'adhésion à une pratique scientifique honnête est primordiale. Nous avons besoin de plus de rigueur et de surveillance afin de s'assurer que l'interprétation des preuves est guidée par les données, pas les émotions, et que les déclarations fortes basées sur de faibles preuves soient évités. Nous avons besoin que ceux qui analysent les demandes de subventions et les articles scientifiques avant publication, agissent de façon responsable. L'e-cigarette peut offrir un moyen de sortir de l'épidémie de tabagisme ou une façon de la perpétuer ; des recherches à la conception solide, mises en œuvre et rapportées de façon honnête, sont les meilleurs outils dont nous disposons pour nous aider à prévoir ce que l'avenir nous réserve.

 

Déclaration d'interêts

Aucun.

 

SARA C. HITCHMAN, ANN MCNEILL & LEONIE S. BROSE

Addictions Department, UK Centre for Tobacco and

Alcohol Studies (UKCTAS), Institute of Psychiatry,

King’s College London, UK.

E-mail: sara.hitchman@kcl.ac.uk

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Publié le 27 Février 2014

Description de l'étude

Cette étude (en libre accès ici) a été réalisée par l'équipe du Dr Konstantinos Farsalinos, en comparant l'absorption de nicotine au cours de deux séances de 65 minutes, l'une avec une e-cigarette de première génération à cartomiseur (V2cigs, USA), ressemblant à une cigarette, l'autre avec une e-cigarette de dernière génération, appelée "mod" (EVIC, Joyetech, Chine) munie d'un clearomiseur (EVOD, KangerTech, Chine). Les deux types de e-cigarette ont été utilisées avec le même liquide à 18 mg/ml (Max Blend, Flavourart SRL, Italie). Le cartomiseur de la V2 était rempli avec 1 ml de liquide et rempli de nouveau en cour de séance si besoin, et était muni d'une batterie au Lithium de 250 mAh, remplacée en cours de séance si nécessaire. Le clearomiseur EVOD était rempli de 2 ml de liquide, et le mod EVIC contrôlé électroniquement était muni d'une batterie au Lithium de 2600 mAh et réglé sur une puissance de 9 Watts.

 

Comparaison de l'absorption de nicotine avec une e-cigarette par rapport à une cigarette

Résultats

Les participants (n=23) âgés en moyenne de 40 ans, avaient fumé en moyenne 22 ans environ et étaient fortement dépendants (moyenne de 33, 6 cigarettes/jour, score de Fagerström de 7 et score à l'échelle CDS de 53). Ils utilisaient l'e-cigarette depuis 19 mois en moyenne, et 20/23 avaient arrêté de fumer totalement depuis moins d'un mois.

Ils ont participé à deux séances en s'abstenant de vaper, de consommer du café ou de l'alcool, pendant au moins 8 heures. Ils devaient alors prendre 10 bouffées d'e-cigarette en 5 minutes (pour comparer avec la consommation d'une cigarette), puis pouvaient vaper comme ils souhaitaient pendant 60 minutes supplémentaires. Avant de commencer à vaper, une mesure de monoxyde de carbone (CO) et un premier échantillon sanguin (pour mesurer la nicotine plasmatique ou nicotinémie) étaient réalisés. Un nouvel échantillon sanguin était ensuite prélevé toutes les 15 minutes, et une dernière mesure de CO était réalisée 10 minutes après la fin de la séance de vape (à 75 minutes).

Les résultats concernant l'absorption de nicotine avec les 2 types de e-cigarette sont présentés ci-dessous.

Comparaison de l'absorption de nicotine avec une e-cigarette par rapport à une cigarette

Comme on peut le constater sur le graphique, la e-cigarette de nouvelle génération (mod EVIC + Clearomiseur EVOD) est plus performante que la e-cigarette de première génération (V2). Ceci dès les 5 premières minutes, et par la suite. A 20 minutes, le mod permet une absorption de nicotine 70% plus élevée que la V2, cette différence diminue avec le temps mais reste de près de 50% supérieure à la fin de la séance de vape. De même la mesure du craving, ou de l'envie de fumer, était significativement plus atténuée par le mod que la V2. Elle était respectivement de 72,3 (mod) et 71,1 (V2) (sur un maximum de 100) au début de la séance, de 47,9 et 60,2 après 10 bouffées en 5 minutes, et de 25,3 et 32,0 à la fin de la séance de vape. De même la satisfaction de la vape et le "throat hit" (impact dans la gorge) étaient significativement plus importants avec le mod.

Bien évidemment, en l'absence de combustion (la e-cigarette vaporise le liquide, mais ne le brûle pas), la mesure du CO n'a pas montré d'élévation (environ 6 ppm au début et à la fin).

Comparaison avec la cigarette

Mais le plus intéressant pour la compréhension de l'efficacité de la vape pour s'abstenir de fumer réside dans la comparaison de l'absorption de nicotine avec la e-cigarette par rapport à la cigarette de tabac. C'est ce qu'ont fait les auteurs de cette étude en comparant des données obtenues dans une autre étude (Vansickel et al. Addiction. 2012). Les résultats sont présentés dans la figure ci-dessous.

Comparaison de l'absorption de nicotine avec une e-cigarette par rapport à une cigarette

Au bout de 5 minutes d'utilisation de l'e-cigarette, la nicotinémie obtenue est considérablement moindre qu'avec une cigarette. Elle est près de 3 fois moindre avec le mod et près de 4 fois moindre avec la V2. Il a fallu aux participants vaper 35 minutes avec le mod pour obtenir la même nicotinémie qu'avec la cigarette en 5 minutes, et la e-cigarette de première génération (V2) n'a permis en 35 minute d'atteindre qu'à peine plus de la moitié de la nicotinémie atteinte avec la cigarette en 5 minutes.

Conclusions

Selon les calculs des auteurs de cette étude, il aurait fallu utiliser un liquide à 50 mg/ml de nicotine pour obtenir une nicotinémie similaire à la cigarette en 5 minutes. Ce qui est loin des 20 mg/ml qui viennent d'être introduits comme limite maximale des liquides qui seront autorisés à la vente lorsque la Directive européenne (voir ici Textes Partie 3), votée hier, sera transcrite dans la nouvelle législation prévue pour 2016.

Perspectives

Par ailleurs, cette étude démontre clairement que pour obtenir une nicotinémie suffisante à satisfaire le besoin du fumeur, les e-cigarettes de nouvelle génération sont plus performantes que celle de première génération (on peut supposer que les e-cigarettes de seconde génération, de type Ego avec clearomiseur, les plus vendues, se situent entre la première et la seconde génération, donc à peine suffisantes pour les fumeurs les plus dépendants). Il se trouve qu'avec cette nouvelle Directive européenne, le sort de ces e-cigarette de nouvelle génération est plus qu'incertain. Ce qui se traduirait pour les fumeurs les plus dépendants, par un fort risque de retourner vers la cigarette. Par ailleurs, cette étude montre aussi que pour un certain nombre de fumeurs (environ 20 à 30% selon les enquêtes réalisées par Jean-François Etter ou Konstantinos Farsalinos), la limite imposée de 20 mg/ml de nicotine est trop basse, et que là encore cela risque de renvoyer vers la cigarette les fumeurs les plus dépendants.

Malgré les demandes répétées des scientifiques, et les très nombreux témoignages et actions des vapoteurs, auprès des Députés européens, l'Union européenne n'a pas pris en compte ce fait, et a basé sa législation sur une méconnaissance totale de la vape. Malheureusement, les bénéfices de l'arrêt du tabac par un nombre croissant de fumeur passant à la vape riquent d'être en partie anéantis. Souhaitons que l'Europe et les Etats membres puissent encore entendre raison lorsqu'ils s'apercevront que dans les 2 années à venir la consommation de tabac, et certainement la prévalence du tabagisme, vont baisser considérablement. En attendant, je conseille au vapoteurs de se tourner vers l'association qui les représentent, l'AIDUCE, et de signer rapidement l'Initiative Citoyenne Européenne (ICE) de l'EFVI.

 

Pour ceux qui voudraient imprimer ce texte voici un PDF.

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Publié le 10 Février 2014

Si vous avez raté cette conférence, vous pouvez écouter le podcast sur le site du CNAM.

Ma présentation est ici.

Vous pouvez aussi consulter Le n°74 de Swaps, et un résumé de ma présentation.

La cigarette électronique s’est invitée sans y être conviée dans le champ de la prévention du tabac. Sa diffusion spontanée semble avoir fait chuter les ventes de cigarettes en 2013.

La "e-cigarette" est-elle une mode ? Une approche résolument nouvelle pour les addictions ? L’industrie pharmaceutique et celle du tabac sont-elles bousculées par cet intrus ? Des spécialistes et des usagers viennent nous éclairer sur ce qui en train de devenir une question de société.

Programme

  • 15h - Accueil - Didier Jayle, professeur du Cnam
  • 15h10 - Réflexions d’un bloggeur qui connaît le risque et la santé- William Dab, professeur du Cnam en santé et sécurité
  • 15h20 - Que savons nous vraiment de la toxicité de la nicotine ? Jacques Le Houezec, consultant tabacologie
  • 15h30 - Tout ce qu’on sait en 2014 de la e-cigarette Gérard Mathern, pneumologue
  • 15h55-16h15 - Discussion
  • 16h15 - Quand la réduction des risques s’applique aux drogues licites Alain Morel, fédération Addiction
  • 16h30 - Le point de vue de l’usager Brice Lepoutre, président de l'Association des usagers de cigarette électronique (Aiduce)
  • 16h45 - Le point de vue de l’État Pascal Melihan-Cheinin, sous-directeur, direction générale de la Santé
  • 17h-17h30 - Discussion
  • 17h30 - Conclusion

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