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Publié le 29 Mars 2013

Voici une nouvelle étude qui va sortir dans le journal Addiction. Pour les anglophiles le résumé est ici : http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/add.12150/abstract

C’est une étude intéressante à plus d’un titre. D’abord par le nombre de vapoteurs, 1347. Ensuite parce qu’ils viennent de 33 pays, dont 72% d’Europe. L’étude a été réalisée entre septembre 2011 et mai 2012 chez des utilisateurs de e-cigarette TECC (Electronic Cigarette Company) et de e-liquide TotallyWicked. L’âge moyen était de 43 ans, 70% étaient des hommes, 44% étaient diplômés. Les vapoteurs recrutés ont rempli un questionnaire sur internet qui prenait environ 15 à 20 minutes à remplir. Il était composé de 6 sections:
1. données démographiques et statut tabagique;
2. le test de Fagerström (pour ceux fumant encore) et une version modifiée « au passé » pour les ex-fumeurs (plus la durée de leur abstinence);
3. les données d’utilisation de la e-cigarette, incluant le type, la dose de nicotine utilisée et les arômes utilisés, ainsi que la quantité en ml par jour, et le nombre de bouffées quotidiennes, mais aussi les motivations de l’utilisation (sans qu’il soit précisé les mots « arrêt du tabac » pour ne pas les influencer), leur dépendance vis à vis de la e-cigarette et leur essais de diminution;
4. les effets de la e-cigarette, incluant la satisfaction, le « hit », l’acceptabilité, le goût, les envies de fumer, l’impact sur leur comportement tabagique et les effets respiratoires (tous évalués sur une échelle en 4 points allant de « pas du tout » à « très »);
5. les effets indésirables de la e-cigarette;
6. d’autres commentaires sur l’utilisation (non analysés pour cet article).

Les résultats montrent que:
78% des ex-fumeurs et 66% des utilisateurs concomitants (fumant encore) ont commencé à vapoter pour trouver une alternative au tabac;
74% ne fumaient plus depuis au moins quelques semaines depuis qu’ils vapotaient (67% des ex-fumeurs ne fumaient plus depuis plusieurs mois et 55% des fumeurs avaient considérablement réduit leur consommation);
91% ne ressentaient plus de forte urgence à fumer (craving) (95% chez les ex-fumeurs et 70% chez les fumeurs);
72% utilisaient un système à réservoir (tank), le plus courant étant l’eGo-C (23%);
la durée d’utilisation moyenne était de 10 mois;
1% seulement utilisaient du NO (0 mg nicotine);

Les vapoteurs considéraient la e-cigarette comme:
étant satisfaisante d’utilisation;
ne créant que peu d’effets indésirables (76% à 99% sans effets indésirables, selon les effets indésirables);
étant plus saine que la cigarette conventionnelle;
améliorant la toux et la respiration;
et étant associée à une réduction importante du craving (envie irrépressible de fumer).

Parmi les ex-fumeurs:
le délai entre le réveil et la première vape était significativement plus long que le délai de la première cigarette du matin (p<0,001), suggérant une moindre dépendance à la e-cigarette comparé à la cigarette conventionnelle;
la réduction du craving était plus importante que chez ceux qui continuaient à fumer (utilisation conjointe de e-cig et de cigarettes) (p<0,0007);

Par rapport aux hommes, les femmes optaient plutôt pour des saveurs douces comme le chocolat (p<0,001), et préféraient les e-cigarettes ressemblant aux cigarettes conventionnelles (p<0,001).

En conclusion, dans cet échantillon, les vapoteurs utilisaient principalement la e-cigarette pour arrêter de fumer, mais avec une durée d’utilisation supérieure à celle observée avec la substitution nicotinique, et considéraient la vape comme étant plus sûre que le tabagisme.

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Publié le 8 Mars 2013

Voici un poster que m’a envoyé son auteure canadienne (en anglais) :

Voilà, j’ai sélectionné tous les articles qui parlent de e-cigarette et qui seront présentés la semaine prochaine au congrès de la SRNT (Society for Research on Nicotine and Tobacco) à Boston, où je serai. Le document est ici.

Évidemment c’est en anglais. Ceux qui savent pourront en extraire les données intéressantes et les partager.

Le site www.treatobacco.net (en 11 langues, dont le français), dont je m’occupe, est en train de créer une page spéciale pour la e-cigarette recensant toutes les études. La page sera bientôt accessible, elle est en construction actuellement.

N’oubliez pas de signer la pétition de AIDUCE !

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Publié le 5 Mars 2013

Mme Marisol Touraine
Ministre des Affaires sociales et de la santé
14, avenue Duquesne
75350 PARIS 07 SP

Rennes, 5 mars 2013

Chère Madame la Ministre,

Je vous ai entendu aujourd’hui sur France Info à propos de la cigarette électronique et de l’enquête que vous avez demandée à vos services. Je vous écris en tant que scientifique, spécialiste de la nicotine et de la dépendance au tabac depuis presque 30 ans (première thèse de science sur ce sujet en France) pour vous proposer de rencontrer vos services afin de leur exposer mon analyse sur la e-cigarette. J’ai déjà alerté certains députés européens à propos de la proposition de nouvelle Directive sur les produits du tabac. En particulier, concernant les e-cigarettes, à les classer pour la grande majorité comme des médicaments.

Alors qu’une réglementation raisonnée protégeant le consommateur (en contrôlant la qualité des e-cigarettes et des e-liquides associés) pourrait être un bienfait pour la santé publique, une réglementation trop contraignante, telle qu’elle est actuellement proposée dans le projet de Directive (en imposant aux fabricants de réglementer la e-cigarette comme un médicament), pourrait simplement priver les fumeurs d’une option considérablement moins nocive que la cigarette conventionnelle, qui par ailleurs est, elle, très peu réglementée et bien plus accessible.

Il est bon de rappeler à ce sujet, que chaque année 70 000 personnes meurent du tabac en France, plus de 500 000 en Europe, et plus de 5 millions dans le monde. Et comme l’a souligné récemment le rapport accablant de la Cour des comptes (http://www.ccomptes.fr/Actualites/A-la-une/Les-politiques-de-lutte-contre-le-tabagisme), les politiques de santé contre le tabagisme n’ont pas été à la hauteur, surtout en France, mais pas seulement, et le lobbying forcené de l’industrie du tabac n’y est pas étranger.

En Europe, l’Angleterre sort du lot et a mis en place une politique efficace depuis les années 2000. Cette politique a porté ses fruits et le nombre de fumeurs a considérablement baissé outre-Manche alors qu’il a augmenté en France entre 2005 et 2010 (à ce propos, nous manquons aussi cruellement de données récentes en France!).
L’Angleterre est aussi en avance concernant la réduction du risque tabagique et des recommandations, incluant la place de la e-cigarette, sont à l’étude par NICE, et seront disponibles prochainement http://guidance.nice.org.uk/PHG/52.

En France, la réglementation actuelle autorise la vente de cartouches contenant moins de 10 mg de nicotine, et de e-liquide ayant une concentration de moins de 20 mg/ml (il existe des concentrations supérieures, mais selon l’agence de réglementation des médicaments, l’ANSM, il faut alors une autorisation de mise sur le marché, comme pour un médicament http://ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/Cigarette-electronique-Point-d-information). Cette situation satisfait pleinement pour l’instant les utilisateurs de e-cigarette. La proposition de nouvelle Directive imposerait une limite de 2 mg par cartouche, ou de 4 mg/ml pour les e-liquides. Pour un pharmacologue, cela indique que ces concentrations ne permettraient pas aux utilisateurs d’obtenir des concentrations sanguines suffisantes pour apaiser leurs symptômes de sevrage, et les obligeraient alors de continuer à fumer pour obtenir les doses de nicotine dont ils ont besoin, à cause de leur dépendance.

Or, tout l’intérêt de la e-cigarette est justement de permettre à son utilisateur d’abandonner rapidement la cigarette, comme en attestent les nombreux messages d’utilisateurs sur les forums de discussion qu’ils ont créés (ces discussions représentent un phénomène nouveau, jamais vu auparavant chez les fumeurs). Ils comptent tous d’ailleurs le nombre de cigarettes (qu’ils appellent «tueuses» ou «cancerettes») qu’ils n’ont pas fumées depuis qu’ils ont commencé la e-cigarette et l’indiquent dans leur signature sur ces forums. Considérant que la fumée de tabac contient, hormis la nicotine qui entretient la dépendance mais ne cause pas les maladies liées au tabac, plus de 7000 substances chimiques, dont le monoxyde de carbone et les gaz oxydants, toxiques pour le système cardio-vasculaire, et les substances cancérigènes, utiliser la e-cigarette permet à ces utilisateurs d’apaiser leur manque de nicotine en éliminant immédiatement l’exposition dangereuse à toutes ces substances toxiques.

Il serait dommage, à cause d’une réglementation trop stricte, d’arrêter ce phénomène qui pourrait enfin voir se réaliser ce que prédisait en 1991 l’un des pionniers de la recherche sur la dépendance tabagique, Michael Russell: «Ce n’est pas tant l’efficacité à court terme des nouveaux substituts nicotiniques comme aide à l’arrêt, mais plutôt leur potentiel à devenir des substituts à long-terme de la cigarette, qui fait de l’élimination du tabagisme un but réaliste… Ces futurs produits devraient être activement promus sur un marché ouvert afin d’entrer en compétition avec le tabac. Il faudra pour cela que les autorités de santé les approuvent, que leurs taxes soient faibles, et que les mouvements anti-tabac les soutiennent afin que l’éradication progressive du tabagisme soit un but atteignable.»

Nous sommes, sur le site www.treatobacco.net, dont je suis le Directeur, en train de collecter l’ensemble des données scientifiques sur la e-cigarette, et nous allons les mettre en ligne prochainement.

Je me mets donc à votre disposition pour de plus amples renseignements concernant la e-cigarette et les données scientifiques dont nous disposons.

Veuillez agréer Madame la Ministre, l’expression de ma considération distinguée.

Jacques Le Houezec
Conseil en Santé publique, Dépendance tabagique
Honorary Lecturer, UK Centre for Tobacco Control Studies, University of Nottingham, England.
Directeur, www.treatobacco.net
Blog : http://jlhamzer.over-blog.com/

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Publié le 28 Février 2013

Cet article rapporte la connaissance de l’existence et « l’utilisation » de la e-cigarette aux USA entre 2010 et 2011.

En 2010 les questionnaires étaient en partie envoyés par courrier (n= 4184 personnes), et en partie à partir d’un site internet (n=2505). En 2011, tout passait par le site internet (n=4050). Les résultats principaux sont indiqués dans le résumé ci-dessous.

Results: In 2010, overall awareness of e-cigarettes was 38.5% (mail survey) and 40.9% (web survey); in 2011, awareness was 57.9% (web survey). Ever use of e-cigarettes among all respondents was 2.1% in the 2010 mail survey, 3.3% in the 2010 web survey, and 6.2% in the 2011 web survey. Ever use of e-cigarettes was significantly higher among current smokers compared with both former and never-smokers, irrespective of survey method or year. During 2010–2011, ever use increased among both sexes, those aged 45–54″years, non-Hispanic Whites, those living in the South, and current and former smokers.

Conclusions: Awareness and ever use of e-cigarettes increased among U.S. »adults from 2010 to 2011. In 2011, approximately
1 in 5 current smokers reported having ever used e-cigarettes. Continued surveillance of e-cigarettes is needed for public health
planning.

Pour les détails, c’est là, en dessous. Pour la connaissance de l’existence de la e-cigarette, rien de bien étonnant compte tenuedu fait que l’on en parle tout de même de plus en plus (même s’il faut tenir compte qu’il s’agit ici de données de 2010 et 2011). On remarque quand même que les plus au courant sont les fumeurs, les moins au courant les non fumeurs.

Pour ce qui est de « l’utilisation », je la mets entre guillemets, parce que la question était : “Have you ever tried any of the following products, even just
one time?” Respondents who selected “electronic cigarettes or e-cigarettes” were considered ever e-cigarette users.

Ce qui veut dire: « Avez-vous essayé ne serait-ce qu’une fois un de ces produits (plusieurs produits présentés)? Si la personne sélectionnait « la cigarette électronique ou e-cigarette » elle était considérée comme utilisateur (sic!).

Alors en analysant le tableau ci-dessous on voit que:

1. c’est surtout les tranches d’âge 18-24 et 35-44 qui sont les plus « utilisateurs ».

2. ce sont surtout les revenus moyens, du Middle West qui « l’utilisent ».

3. ce sont principalement les fumeurs qui l’ont « utilisé », avec une augmentation non négligeable entre 2010 et 2011, pour atteindre environ 20% des fumeurs.

4. par contre les non fumeurs n’ont pas modifié leur comportement entre 2010 et 2011, et ceux qui ont « utilisé » la e-cigarette représentent 1,3%. De quoi en faire des gorges chaudes, n’est-ce pas !! Surtout lorsqu’on lit en conclusion du résumé ci-dessus : « En 2011, environ 1 fumeur sur 5 a utilisé la e-cigarette. Une surveillance de la e-cigarette est nécessaire pour la planification de la Santé publique. »

La connaissance et « l’utilisation » de la e-cigarette aux USA !

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Publié le 24 Février 2013

Une étude anglaise vient de comparer l’association entre consommation d’alcool et de tabac chez les jeunes élèves anglais entre 2004 et 2006 pour le tabac (de 14 à 16 ans) et entre 2004 et 2007 pour l’alcool (14 à 17 ans). Cela représente les données de 13 635 élèves.

Les résultats montrent que le pourcentage d’élèves consommant de l’alcool (à partir d’une fois par mois, jusqu’à une à deux fois par semaine ou plus) passe de 26% à 14 ans à 71% à 17 ans, et que parallèlement, ceux qui fument (à partir d’une cigarette par semaine, jusqu’à une cigarette par jour ou plus) passent de 12% à 14 ans à 27% à 16 ans. Les élèves des classes sociales les moins favorables sont plus fumeurs, mais boivent moins d’alcool que ceux des classes les plus aisées. Les deux comportements sont fortement associés. Les élèves qui boivent sont 3 fois plus nombreux à fumer que ceux qui ne boivent pas, et réciproquement, ceux qui fument sont 3 fois plus nombreux à boire de l’alcool que ceux qui ne fument pas. La progression dans le temps des deux comportements est aussi fortement corrélée.

En conclusion, les consommations d’alcool et de tabac sont fortement corrélées chez les adolescents à partir de l’âge de 14 ans (limite inférieure de l’étude) et évoluent parallèlement pendant l’adolescence.

http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S009174351300039X

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Publié le 11 Février 2013

Chère Madame la Députée,

Je vous écris en tant que scientifique, spécialiste de la nicotine et de la dépendance au tabac depuis presque 30 ans (première thèse de science sur ce sujet en France) pour vous alerter sur des recommandations de la future Directive sur les produits du tabac qui risquent de mettre en danger la vie de millions d’européens.

La proposition de nouvelle Directive sur les produits du tabac, se propose de réglementer les produits délivrant de la nicotine, y compris les cigarettes électroniques, ou e-cigarettes. En particulier, concernant ces dernières, à les classer pour la grande majorité comme des médicaments. Alors qu’une réglementation raisonnée protégeant le consommateur (en contrôlant la qualité des e-cigarettes et des e-liquides associés) pourrait être un bienfait pour la santé publique, une réglementation trop contraignante, telle qu’elle est actuellement proposée dans le projet de Directive (en imposant aux fabricants de réglementer la e-cigarette comme un médicament), pourrait simplement priver les fumeurs d’une option considérablement moins nocive que la cigarette conventionnelle, qui par ailleurs est, elle, très peu réglementée et bien plus accessible.

Il est bon de rappeler à ce sujet, que chaque année 70 000 personnes meurent du tabac en France, plus de 500 000 en Europe, et plus de 5 millions dans le monde. Et comme l’a souligné récemment le rapport accablant de la Cour des comptes (http://www.ccomptes.fr/Actualites/A-la-une/Les-politiques-de-lutte-contre-le-tabagisme), les politiques de santé contre le tabagisme n’ont pas été à la hauteur, surtout en France, mais pas seulement, et le lobbying forcené de l’industrie du tabac n’y est pas étranger. En Europe, l’Angleterre sort du lot et a mis en place une politique efficace depuis les années 2000. Cette politique a porté ses fruits et le nombre de fumeurs a considérablement baissé outre-Manche alors qu’il a augmenté en France entre 2005 et 2010 (à ce propos, nous manquons aussi cruellement de données récentes en France!).

Les e-cigarettes sont des dispositifs permettant de délivrer de la nicotine, et sont conçues pour produire un effet similaire à la cigarette conventionnelle. Une e-cigarette est composée habituellement de trois parties: une batterie, un atomiseur et une cartouche, jetable ou réutilisable, contenant ou non de la nicotine. La plupart des cartouches jetables et les e-liquides qui servent à remplir les cartouches réutilisables, contiennent de la nicotine diluée dans du propylène glycol ou de la glycérine, et de l’eau. Le taux de nicotine dans les cartouches peut varier et certaines contiennent aussi des arômes. Lorsque l’utilisateur tire sur sa e-cigarette, le chauffage de la résistance vaporise le liquide contenu dans la cartouche. La vapeur créée délivre la nicotine à l’utilisateur. Il n’y a pas de fumée passive, mais un peu de vapeur de nicotine est libérée dans l’air lorsque l’utilisateur exhale celle-ci (extrait de la traduction d’un document proposé par l’association ASH en Angleterre, disponible en français et en anglais sur le site: http://ash.org.uk/information/facts-and-stats/ash-briefings).

En France, la réglementation actuelle (assez floue, comme dans beaucoup de pays) autorise la vente de cartouches contenant moins de 10 mg de nicotine, et de e-liquide ayant une concentration de moins de 20 mg/ml (il existe des concentrations supérieures, mais selon l’agence de réglementation des médicaments, l’ANSM, il faut alors une autorisation de mise sur le marché, comme pour un médicament http://ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/Cigarette-electronique-Point-d-information). Cette situation satisfait pleinement pour l’instant les utilisateurs de e-cigarette. La proposition de nouvelle Directive imposerait une limite de 2 mg par cartouche, ou de 4 mg/ml pour les e-liquides. Pour un pharmacologue, cela indique que ces concentrations ne permettraient pas aux utilisateurs d’obtenir des concentrations sanguines suffisantes pour apaiser leurs symptômes de sevrage, et les obligeraient alors de continuer à fumer pour obtenir les doses de nicotine dont ils ont besoin, à cause de leur dépendance.

Or, tout l’intérêt de la e-cigarette est justement de permettre à son utilisateur d’abandonner rapidement la cigarette, comme en attestent les nombreux messages d’utilisateurs sur les forums de discussion qu’ils ont créés (ces discussions représentent un phénomène nouveau, jamais vu auparavant chez les fumeurs). Ils comptent tous d’ailleurs le nombre de cigarettes (qu’ils appellent «tueuses» ou «cancerettes») qu’ils n’ont pas fumées depuis qu’ils ont commencé la e-cigarette et l’indiquent dans leur signature sur ces forums. Considérant que la fumée de tabac contient, hormis la nicotine qui entretient la dépendance mais ne cause pas les maladies liées au tabac, plus de 7000 substances chimiques, dont le monoxyde de carbone et les gaz oxydants, toxiques pour le système cardio-vasculaire, et les substances cancérigènes, utiliser la e-cigarette permet à ces utilisateurs d’apaiser leur manque de nicotine en éliminant immédiatement l’exposition dangereuse à toutes ces substances toxiques.

Il serait dommage, à cause d’une réglementation trop stricte, d’arrêter ce phénomène qui pourrait enfin voir se réaliser ce que prédisait en 1991 l’un des pionniers de la recherche sur la dépendance tabagique, Michael Russell: «Ce n’est pas tant l’efficacité à court terme des nouveaux substituts nicotiniques comme aide à l’arrêt, mais plutôt leur potentiel à devenir des substituts à long-terme de la cigarette, qui fait de l’élimination du tabagisme un but réaliste… Ces futurs produits devraient être activement promus sur un marché ouvert afin d’entrer en compétition avec le tabac. Il faudra pour cela que les autorités de santé les approuvent, que leurs taxes soient faibles, et que les mouvements anti-tabac les soutiennent afin que l’éradication progressive du tabagisme soit un but atteignable.»

Sachant que le groupe Environment, Public Health and Food Safety du Parlement européen doit se réunir bientôt pour des auditions concernant la réglementation des produits du tabac, je me mets à votre disposition pour de plus amples renseignements concernant ce projet de Directive.

Veuillez agréer Madame la Députée, l’expression de ma considération distinguée.

Jacques Le Houezec
Conseil en Santé publique, Dépendance tabagique
Honorary Lecturer, UK Centre for Tobacco Control Studies, University of Nottingham, England.
Directeur, www.treatobacco.net

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Publié le 8 Février 2013

C’est l’équipe de Riccardo Polosa, en Italie, qui publie cette étude pilote (sur 14 fumeurs n’ayant pas l’intention d’arrêter) sur l’utilisation de la e-cigarette pour réduire le risque tabagique. Le critère principal d’évaluation était une réduction du nombre de cigarettes fumées d’au moins 50% à 1 an (vérifié par diminution du CO expiré). Le critère secondaire était l’abstinence d’au moins 30 jours à 1 an, avec aussi vérification du CO expiré (<10ppm).

Les résultats montrent que la moitié des patients ont réussi à réduire d’au moins 50% à 1 an (7/14, qui sont passés de 30 cig/j à 15 cig/j), et que 2 patients (14,4%) étaient abstinents à 1 an (soit 9/14 qui ont réussi à réduire ou arrêter de fumer).

Les effets secondaires ont été modestes (nausées, irritation de la gorge et maux de tête chez 14,4% des personnes, et toux sèche chez 28,6%), et les symptômes positifs (voix, hallucinations) et négatifs (humeur dépressive, anxiété) des patients n’ont pas été modifiés par la réduction ou l’arrêt.

Cet article est en accès libre, pour ceux qui lisent l’anglais : http://www.mdpi.com/1660-4601/10/2/446

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Publié le 31 Janvier 2013

C’est une étude suédoise sur le snus qui apporte peut-être une piste intéressante pour le traitement de la sclérose en plaques. Deux études cas-contrôles portant sur l’épidémiologie et la génétique de la sclérose en plaques ont servi de base à cette analyse. Dans ces deux études la consommation de tabac (fumé ou non-fumé) a été précisément quantifiée. Par ailleurs certaines études récentes tendent à mettre en cause les récepteurs α7 dans la modulation de la réponse immunitaire et les processus inflammatoires, ce qui a conduit ces auteurs à se poser la question de l’effet du snus par rapport à celui du tabac fumé (qui on le sait est un facteur aggravant pour la sclérose en plaques). Les résultats sont assez surprenant, chez tous les cas de sclérose en plaques, le fait de fumer ou d’avoir fumé augmente significativement le risque de maladie (ORs de 1,35 à 1,56 ; p<0,0001), mais chez ceux qui n’ont utilisé que du snus sans jamais avoir fumé, il y a un effet protecteur très significatif (après ajustement sur les facteurs confondants, OR=0,75 ; IC 95% 0,63-0,90 ; p=0,002). En prenant en compte la quantité de snus utilisée par jour (quantifiée en «paquets-année», un paquet correspondant à 50 g de tabac), l’étude montre qu’une consommation de snus (en contrôlant la consommation de tabac fumé) a un effet protecteur tant chez les femmes (même avec un très faible échantillon, car elles utilisent moins le snus que les hommes, 5 cas/18 contrôles pour celles utilisant >10 paquets-année) que chez les hommes (à partir de 1 paquet-année, sur un échantillon de 595 cas/773 contrôles). Selon l’analyse de la littérature des auteurs, le système cholinergique, par l’action des récepteurs α7, aurait un effet inhibiteur sur la libération de cytokines pro-inflammatoires par les cellules immunitaires (comme les macrophages), et la nicotine aurait un effet plus important que celui de l’acétylcholine. Les auteurs concluent donc que l’effet protecteur observé ici dans cette population d’utilisateur de snus, serait dû à l’action directe de la nicotine, ce qui ouvre un champs de recherche intéressant pour les agonistes α7 dans la sclérose en plaques.

Hedström A et al. Mult Scler. 2013 Jan 14. [Epub ahead of print] http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23319071

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