Publié le 27 Septembre 2014
Présentation du plan sur le site sante.gouv : http://www.sante.gouv.fr/marisol-touraine-presente-le-programme-national-de-reduction-du-tabagisme.html
Madame la Ministre déclare que : "Le vapotage sera interdit dans certains lieux publics. Conformément à l’avis du Conseil d’Etat du 17 octobre 2013, la cigarette électronique sera interdite dans les établissements accueillant des mineurs (les écoles, par exemple) dans tous les moyens de transport collectif, dans tous les espaces clos collectifs de travail."
Que recouvrent exactement "les espaces clos collectifs de travail"?
Cela veut-il dire qu'une personne seule dans un bureau pourra vaper comme elle le souhaite? Ce qui bien évidemment créerait une injustice par rapport à ceux qui travaillent à plusieurs dans une pièce.
Malheureusement, cette mesure ne tient pas compte de la réalité de la vape, puisque lorsqu'un fumeur peut se contenter de quelques pauses de 5-10 min au cours de la journée, l'utilisateur de vaporisateur de nicotine ne pourra pas combler son manque de cette façon. En effet, pour obtenir la même dose de nicotine qu'un fumeur en 5 min, il faut vaper entre 30 min et 1h suivant le matériel utilisé. Le principe de la pause est donc incompatible avec l'utilisation efficace d'un vaporisateur de nicotine. Cela ne fera qu'entretenir le vapeur dans une consommation mixte, où il fumera lors de ses pauses, et ne pourra vaper qu'en dehors de son lieu de travail. Ce qui est contraire à l'efficacité du VP dans le but d'arrêter de fumer. Par ailleurs, qu'en sera-t-il si un jour un fabriquant décide d'obtenir une AMM pharmaceutique, comme BAT l'a fait en Angleterre?
Le dossier de presse indique que : "De plus, l’utilisation de la cigarette électronique dans des lieux publics tend à banaliser l’attitude du fumeur et s’inscrit donc à rebours des politiques de lutte contre le tabagisme menées à l’échelle nationale et internationale depuis plusieurs dizaines d’années."
Où sont les preuves de cette affirmation? En quoi le fait de vaper inciterait plus à fumer qu'à vaper? Pourquoi ne pas penser que c'est justement l'inverse qui peut se produire? Combien de fumeurs ont été convertis au vapotage en voyant leurs collègues de travail le faire? Cette prise de position s'inspire largement de ce que l'on peut lire dans le document de travail de l'OMS en vue de la CoP6 (qui aura lieu à Moscou en octobre), que nous avons critiqué dans un article publié dans la revue Addiction, et pas de la réalité du comportement ou des données des enquêtes et études (sur le vapotage passif par exemple). A l'opposé, il faut saluer la position de l'Angleterre qui s'est refusée de prendre une telle disposition.
Madame la Ministre ne semble pas non plus avoir pris en compte l'analyse de la littérature scientifique en ce qui concerne la soit-disant porte d'entrée dans le tabagisme (voir http://jlhamzer.over-blog.com/2014/09/notre-reponse-au-document-de-l-oms.html) :
Elle déclare: "Mais, pour un jeune qui n’a jamais fumé, la cigarette électronique peut devenir une porte d’entrée vers le tabagisme, comme le met en garde le Haut conseil de la santé publique. L’industrie du tabac investit aujourd’hui dans la cigarette électronique, preuve qu’elle a bien compris son potentiel d’addiction. Elle crée des arômes pour rendre la cigarette électronique plus attractive pour les jeunes consommateurs."
Si l'industrie du tabac investit aujourd'hui dans la cigarette électronique, elle ne le fait que dans le secteur des "cigalikes", qui ne sont pas suffisamment efficaces pour aider le fumeur à arrêter de fumer, ce qu'a bien compris cette industrie qui cherche à protéger son marché juteux. Par ailleurs ces "cigalikes" ne sont pas aromatisées, ou simplement par un goût tabac ou menthe, mais certainement pas par les arômes incriminés comme étant faits pour attirer les jeunes. Ce sont les VP de nicotine, qui ne sont pas fabriqués par l'industrie du tabac, qui utilisent les arômes parce qu'ils sont un élément essentiel du plaisir qui permet au fumeur d'abandonner et de se détacher de la cigarette de tabac. Les récentes données anglaises confirment d'ailleurs que les jeunes ne sont pas des utilisateurs réguliers.
Encore une fois, on peut se demander qui conseille Mme la Ministre et pourquoi ses conseillers semblent sourds aux recommandations des scientifiques et aux témoignages des vapeurs.